Le 2 août 1914, il y a 95 ans, éclatait la première guerre mondiale. Une guerre totale au cours de laquelle rien ni personne ne fut épargné: villes détruites; populations massacrées, déplacées, déportées; recours aux otages; soldats jetés dans une terrible moisson qui allaient faucher des millions d'hommes pendant 50 mois; prisonniers utilisés comme main d'oeuvre...
Brasparts, comme toutes les communes du Finistère, de Bretagne, de France, vit partir la fleur de sa jeunesse... Heureux et insouciants comme des jeunes peuvent l'être, persuadés que la guerre serait terminée rapidement, une fois Guillaume chassé... Ils allaient cruellement déchanter, et bientôt comprendre que cette guerre serait longue et terrible...
Ce qu'il en reste aujourd'hui: un monument aux morts, magnifique dans sa conception, tragique dans sa liste interminable de noms de jeunes hommes qui ne sont jamais revenus, tragique aussi par la souffrance des familles qui n'ont pas revu les leurs ou qui les ont parfois redécouverts marqués à vie par la souffrance, la peur, l'héroïsme, le sang, la mort et souvent aussi marqués dans leur chair...
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Lorsque les braspartiates reçurent leur ordre de mobilisation à partir du 2 août, ils gagnèrent leurs régiments d'affectation où ils furent reçus par la population dans une espèce de joie patriotique...En 1914, sur les 5 départements bretons, étaient stationnés 14 régiments d'infanterie, 4 régiments de cavalerie, 8 régiment d'artillerie... Le régiment du génie était à Angers (où il est toujours...)
Les historiques de ces régiments, les témoignages des anciens, les journaux de marche parfois, nous laissent des descriptions étonnantes.
A la mobilisation, le 19ème RI et le 2ème RIC tenaient garnison à Brest: il quittent la garnison le 8 août et « débarquent de leurs trains fleuris » dans la région de Challerange pour l'un, de Bar Le Duc pour le second.
Le 118ème, basé à Quimper, s'embarque le même jour vers Reims et les Ardennes: accueil « sympathique des populations sur tout le parcours »; « tout le monde est joyeux, on a l'impression que chacun est décidé à faire tout son devoir pour défendre la Patrie menacée. »
Le 116ème, de Vannes, quitte sa garnison « salué par les acclamations de la population et par les autorités de la ville. »
A Saint Brieuc, le 71 défile dans la cour du quartier, puis à travers la ville: « une foule énorme de civils est massée sur les trottoirs. C'est noir de monde partout. Des guirlandes et des drapeaux partout! », raconte un témoin. « Un formidable « Vive la France! Nous accueille dans la rue... Quelle frénétique acclamation! Puis on nous comble de douceurs, de vin, de liqueur! Partout on crie « Oh les braves petits pious pious! ». 3dans toutes les gares on nous accueille aux cris de Vive la France! On nous fête partout. ». Le 6 août au soir, le régiment débarque dans l'Aisne.
A Lorient, le 62ème RI s'embarque à la gare après une « véritable marche triomphale. Une foule émue et considérable l'entoure et l'acclame sans discontinuer. Le sous-préfet, la municipalité et toute la population lorientaise se trouvent à la gare pour saluer le drapeau et les bataillons qui partent pour la frontière. Les soldats sont animés d'un enthousiasme indescriptible... ».
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Premier acte, premiers drames: la bataille des frontières (10 au 28 août 1914)
A peine débarqués de leurs trains, les régiments bretons vont très rapidement être engagés dans cette bataille qui marque la prise de contact entre les deux armées ennemis.
Le plan de état-major français prévoit d'emporter l'Alsace-Lorraine et de prendre de flanc la percée allemande dans les Ardennes belges.
Le plan Schlieffen modifie l'action française: les français risquent d'être contournés par l'avance rapide des allemands en Belgique. Le général Joffre décide le déplacement de sa Vème armée vers le Nord pour l'installer défensivement le long de la vallée de la Sambre et de la Meuse entre Dinant et Charleroi. Il ne s'attend pas à ce que le mouvement des troupes allemandes soit déjà amorcé...
A égale distance de Charleroi et de Namur, sur la Sambre, les villages d'Auvelais et d'Arsimont.
Auvelais s'étale sur les deux rives de la Sambre, vers laquelle dévalent en pente douce les croupes du plateau d'Arsimont faisant contraste avec les pentes abruptes et boisées de la rive gauche.
Le premier contact avec les Allemands se produit le 21 août.
A une heure tardive de l'après-midi, le 71ème Régiment d'Infanterie reçoit comme mission de rejeter l'ennemi coûte que coûte sur la rive gauche de la Sambre.
Le régiment se porte en avant “avec un entrain magnifique” .
Il franchit sons les obus et les balles les crêtes au Sud d'Arsimont. C'est là que tombe le premier braspartiate:
Yves Marie Favennec, né à La Motte en Brasparts le 30 juillet 1893, fils de Jean François et de Marie Louise Le Saux.
A 19 heures, drapeau déployé, les 3 bataillons montent à l'assaut d'Auvelais et Tamines.
Mais ces villages sont fortement tenus par un ennemi invisible terré dans des tranchées et disposant d'une quantité de mitrailleuses.
Le caporal Armand Riou, né à Brasparts le 13 septembre 1890, fils de Jacques et de Marie Anne Omnès, tombe à son tour...
“Beaucoup des nôtres sont tombés, soit tués, soit blessés”, dira un survivant; “Partout, on ne voit guère que des pantalons rouges! Que de taches rouges jonchent le sol! Pendant ce combat, nous avons perdu environ 800 hommes. C'est infernal! Quel baptême du feu!”
Vers 20 heures, le 1er bataillon atteint la lisière Sud d'Auvelais ; il échoue dans ses tentatives de pénétrer dans la rue principale et de déborder la localité par l'Est.
La nuit est complète, le régiment menacé d'encerclement doit se replier...
Sur 3000 hommes, il n'en reste que 145... Le chef de Corps envoie au Ministère de la Guerre la dépêche: “Belgique, 71ème RI anéanti”...
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Dans le même temps, la IVème armée française à laquelle appartient la 3ème division coloniale (dont le 2ème Régiment d'Infanterie Coloniale) fait mouvement depuis sa zone de regroupement dans la région de Sainte Ménéhould (Champagne). Elle a ordre de se porter sur Neufchâteau pour prendre de flanc la progression allemande. Là encore, la surprise est totale lorsque les deux armées se rencontrent...
Je ne reviendrai pas sur les détails de cette bataille dont le lieutenant Garos établit un récit d'une très grande précision (sa conférence de 1929 est en ligne sur le site:
http://www.rossignol.free.fr/ )
Mais nous retiendrons que ce fut là, au combat de
Rossignol (22 août 1914) que les coloniaux reçurent leur baptême du feu .
Le
2ème Régiment d'Infanterie Coloniale, après s'être regroupé dans la région de Bar-le-Duc, avait entrepris, au matin du 22 août, de rejoindre ses nouvelles positions dans la région de Neufchâteau.
L'étape prévue était d'une quarantaine de kilomètres; et bien que l'ordre préparatoire, reçu dans la nuit, portât qu'on attaquerait l'ennemi partout où on le rencontrerait, personne ne croyait vraiment à un engagement sérieux avant le lendemain ou le surlendemain : les aviateurs avaient signalé l'avant-veille seulement, et au delà de Neufchâteau, des colonnes ennemies défilant vers le nord-ouest.
La veille, on avait marché durant presque tout le jour; les hommes ayant à peine eu le temps de manger, étaient arrivés au cantonnement par une pluie battante, harassés de fatigue. Le régiment était reparti à l'aube, et tous attendaient avec impatience de rejoindre leur bivouac...Le général Rondony, commandant de division, était en tête du régiment.
C'est vers 7h30 que l'avant-garde de la 1ère brigade est accrochée alors qu'elle allait dépasser le village de Rossignol et s'engager dans la forêt de Neufchâteau. Les dragons se précipitent mais sont contraints de mettre pied à terre devant l'impraticabilité du terrain...
L'infanterie intervient, avec ordre de pousser la marche vigoureusement. Mais elle se heurte presque aussitôt à des tranchées dissimulées dans la forêt et défendues par de l'infanterie avec des mitrailleuses. Une lutte très violente s'engage; les tranchées les plus avancées sont enlevées à la baïonnette; mais sur la route qu'on n'arrive pas à dégager assez vite, les unités de soutien se trouvent exposées a des feux d'enfilade et subissent en quelques instants des pertes sensibles.
Il y a un moment d'hésitation: les régiments sont engagés successivement, mais rapidement les généraux qui sont au contact avec leurs troupes se rendent compte du piège: les allemand ont entamé une manoeuvre d'encerclement. Dès 9h30, l'encerclement est complet. Les mitrailleuses allemandes poursuivent leur oeuvre de destruction sans relache. Deux compagnies du 2ème RIC, les 11ème et 12ème, vont permettre le repli, faisant preuve d'une ténacité et d'une endurance remarquables empêchant durant 6 heures, par un feu continu, l'ennemi de déboucher de la forêt de Neufchâteau.
Le contact est pris partout ; les blessés refluant de l'avant vont au château de Rossignol: parmi eux,
Joseph Marie Labous, né le 5 avril 1893, fils de Yves et de Marie Louise Le Reste; il mourra des suites de ses blessures le 5 septembre à l'hôpital d'Etapes de Marbehan. Aucun acte ne sera dressé, et ce n'est que 24 octobre 1918 que le tribunal de Châteaulin réparera cet oubli...
Rassemblant ce qui reste de son régiment, le colonel GALLOIS lance une contre-attaque contre le
mouvement offensif, mais après la sortie du bois, il est assailli par des tirs d'artillerie. Dans un nouveau bond, il recueille un groupe du 1er colonial, mais il tombe, frappé au ventre par une balle.
A 18 h. 30, les Allemands envahissent le château et prennent pied dans le village.
“L'ennemi nous poursuivant en progressant de plus en plus au delà de Rossignol, craignant que le drapeau ne tombât entre ses mains, le soldat LE GUIDEC l'enfouit en terre à Villers-sur-Semoy pendant la traversée du village.”, peut-on lire dans l'historique du régiment.
Le régiment avait perdu 2.850 hommes, trois sections de mitrailleuses et les convois des 1er et 2e bataillons. Parmi les morts et disparus, deux braspartiates:
-
Jean Yves Salaün, né le 30 août 1890, fils de Jean et de Marguerite Favennec, sergent au 2ème RIC, qu'il avait rejoint en mai 1914 après avoir servi au Tonkin comme engagé volontaire depuis 1911;
-
Pierre Pouliquen, né le 11 mars 1893 à Roudouderc'h en Saint Cadou, fils de Jean François et de Marie Françoise Sizun, cultivateurs à Saint Rivoal
François Marie Picard et
Pierre Jean Picard, leurs compagnons, de Saint Rivoal, seront eux blessés et faits prisonniers; ils ne reverront la France que le 7 décembre 1918 pour le premier et le 28 août 1919 pour le second...
Il ne restait plus que quelques groupes qui réussirent à franchir les lignes allemandes pendant la nuit.
Les restes du 2e R.I.C. se regroupent le 23 août à Gérouville et prennent part à tous les replis successifs jusqu'à la Marne.
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Ce même 22 août, le 11ème corps auquel appartiennent les Régiments Bretons se heurte à un Corps d'Armée allemand à Maissin. Face à face se trouvèrent, dans un nouveau et terrible combat de rencontre, près de 50 000 soldats!
Comme à Rossignol, comme à Arsimont, l'ordre du général Joffre,
“L'ennemi sera attaqué partout où on le rencontrera” sera appliqué à la lettre...
La 4e armée française comprenait le 9e corps d'armée de Tours, le 11e de Nantes, le 17e de Toulouse, le 12e de Limoges, le 2e d'Amiens, le corps d'armée colonial (les "marsouins", ex-infanterie de marine), les 4e et 9e divisions de cavalerie. Le terrain où elle allait combattre, les Ardennes belges, de Givet à Virton, est une succession de plateaux boisés, aux forêts très denses, découpés par des cours d'eau qui ont cloisonné le paysage en creusant des ravins profonds. Les villages sont nichés dans des cuvettes ou dans des clairières de la forêt.
Le 11e corps d'armée du général Eydoux se heurta à Maissin au XVIIIe corps d'armée du général Von Schenck. Le 11e C.A. était fort de dix régiments d'infanterie (28 000 fantassins), de trois régiments d'artillerie de campagne (120 pièces de 75 mm), d'un régiment de cavalerie et de compagnies du génie. Ses contingents venaient du recrutement de Bretagne et de Vendée.
Le
19ème régiment d'infanterie, qui tenait garnison à Brest, a quitté la Bretagne le 8 août et dévarqué de ses trains fleuris dans la région de Challerange.
Les jours suivants, il est à Sedan puis franchit la frontière belge. Le 22 août, il débouche sur le plateau de Paliseul, et se porte, à découverts, sans préparation d'artillerie, à l'attaque de l'ennemi retranché dans le village de Maissin.
“Le choc est des plus rudes. Les allemands, abrités dans les tranchées, et couverts de nombreuses clôtures en fils de fer, essaient d'arrêter par des feux meurtriers la marche du régiment. Mais ils ne peuvent avoir raison du magnifique élan, de la ténacité, de la volonté de vaincre du 19ème qui enlève à la baïonnette le village de Maissin et s'y maintient toute la nuit malgré de violents retours offensifs.”
Dans les rangs du 19, un autre braspartiate,
Charles Yves Timothée Marie Mazé, né le 23 janvier 1893, fils de Michel et de Marie Anne Le Meur, est tombé à son tour.
Jacques Marie Riou, né le 20 février 1893 à Brasparts, fils de Jean François et de Marie Catherine Ruelland, connaîtra également un sort tragique: soldat au 19, blessé grièvement à Maissin, il est porté disparu mais sera fait prisonnier et disparaîtra au camp de Cassel Kiederziedbron le 3 décembre 1918, victime de la grippe espagnole...
Les
118ème et le 116ème régiments d'infanterie, sont engagés à la suite du 19.
Le 118, stationné à Quimper, a rejoint Reims en train puis la frontière belge par marches successives. Il arrive à Maissin après le 19, qui était chargé d'éclairer la division. “Après avoir dépassé Paliseul, nous commençons à entendre la fusillade, et peu après, nous rencontrons des chevaux et des cavaliers blessés, qui se portaient en arrière.”
Le 118 est alors envoyé sur Maissin. “Les Boches sont retranchés là depuis plusieurs jours, dans les bois, les champs d'avoine, les champs de blé.Les bataillons se déploient et progressent sous une grêle de balle. Dans un élan magnifique, les officiers, sabre au clair, les soldats, baïonnette au canon, se portent à l'assaut des positions ennemies...”. C'est dans cette attaque que tombent
Mathieu Yves Le Baut, né à Brasparts le 25 janvier 1889, fils de Michel et de Anne Favennec, et le sergent Charles Bicrell, né à Brasparts le 12 janvier 1890, fils de Ollivier et de Jeanne Sinq.
“Le 19ème, criblé de projectiles, a déjà subi de lourdes pertes...L'uniforme grisâtre de l'ennemi est tellement invisible que l'on ne se rend pas compte des points d'où partent les coups. Une batterie du 35ème... a déjà perdu la plus grande partie de son effectif et ne peut tirer un coup de canon sans être aussitot criblée d'obus.”
Le 116 vient alors renforcer le 118.
Lui aussi venait de Bretagne, de Vannes précisément. Débarqué de ses trains dans les Ardennes, lui aussi à rejoint en marches forcées la frontière belge, se joint à la colonne unique que forme sa division derrière le 19 et le 118. Ces deux régiments engagés et en difficulté dans Maissin, où personne ne s'attendait à trouver l'ennemi, le 116 rentre à son tour dans la fournaise.
“La lutte est excessivement dure, les allemands, avec le concours d’une puissante artillerie, font des ravages dans nos rangs, tirent sans cesse sur nos fantassins qui, pour la plupart, sans avoir pu tirer un coup de fusil, avancent quand même”.
Parmi les soldats du 116,
Pierre Jean Le Goff, né le 26 septembre 1893 à Brasparts, fils de François et de Marie Françoise Le Gall, ne se relèvera pas.
A 19 h, par une attaque à la baïonnette au son des clairons, les fantassins français rejetaient les Allemands du village.
Pendant ce temps, les 62e, 64e et 65e R.I. avaient lutté pour chaque crête et chaque bois que les Hessois leur disputaient avec une égale ténacité.
Suivant le mouvement général de l'armée qui se reportait vers la frontière française, le 11e C.A. battit en retraite le 23 août en abandonnant le champ de bataille, les morts et les blessés intransportables à l'ennemi. Des centaines de blessés reçurent les premiers soins dans les villages de Transinne, Redu et Our où ils furent faits prisonniers par l'armée allemande.
Cette bataille de rencontre comme l'un des plus meurtriers affrontements, avec Rossignol et Ethe, du samedi 22 août 1914 dans la province belge de Luxembourg: côté français les pertes sont estimées à 4500 hommes, tués ou blessés; côté allemand, elles seraient identiques...
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Dès le 1er août, le
67ème Régiment d'Infanterie de Soissons avait quitté sa garnison pour la Meuse avant de s'installer défensivement près de Saint Mihiel. Le 16 août, il reçoit ordre de faire mouvement, avec sa division, vers le nord, et rejoint Cosnes où il reçoit le baptême du feu le 22 août.
Il vient de franchir la Thiers à hauteur de Cons-la-Granville lorsqu'il est pris à partie par des feux d'enfilade venant d'artillerie lourde et de mitrailleuses. Pendant trois longues heures, il va subir un feu intense, suivi d'une attaque de l'infanterie allemande, toujours appuyée par l'artillerie.
Bientôt, l'ensemble de la division doit commencer son repli, et le 67 se positionne autour de Longuyon. A la nuit, le régiment a perdu 27 tués, 268 blessés et 101 disparus...
Le matin du 23, le feu recommence de plus belle: “toute la matinée, il est pris d'écharpe par l'artillerie lourde ... et reçoit à midi l'ordre de se replier sur Longuyon.”Ce nouvel engagement lui coûte 40 blessés et 48 disparus.
Le 24 août, l'attaque allemande reprend, appuyée de sections de mitrailleuses. Une contre-attaque à la baïonnette sur une section de mitrailleuses permet de rétablir le dispositif défensif. Les actions héroïques ne se comptent plus; le colonel commandant le régiment commande lui-même sa troupe au combat; mais l'ennemi parvient à l'envelopper. Il parvient de nouveau à se replier, sous le feu croisé des mitrailleuses et des obusiers...
C'est dans l'un de ces combats du 24 août 1914 que tombe
Jean François Broustal, né le 12 janvier 1890 à Brasparts, fils de Guillaume et de Anne Lagadec, cultivateurs à Quillivien.
Il y aura, en ce troisième jour de combat, 66 tués, 284 blessés, 244 disparus...
Le 67 parviendra à se dégager, recevra pour mission de protéger la retraite de la division (25 et 26 août) avant de recevoir en renforcement 12 officiers et 1000 hommes qui lui permettront de se reconstituer avant de s'installer défensivement sur la Meuse...
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Deuxième acte: la retraite
Après l'échec des offensives en Belgique et dans les Ardennes, nos armées doivent se replier. La retraite est héroîque et les allemands doivent lutter pied à pied pour conquérir chaque pouce de terrain. Nos soldats s'accrochent au terrain, aux villages...
La fixation des armées allemandes par les troupes belges, anglaises et françaises va permettre un rétablissement de nos lignes et surtout de gagner un temps précieux.
Le commandant en chef, le général Joffre, dont l'incompétence n'aura eu d'égal que sa vanité, "limoge"sans retenue des généraux, faisant retomber sur eux son échec personnel...
Il sauvera sa "gloire" lors de la bataille de la Marne...
Du 3 au 25 août 1914, les bretons du
318ème Régiment d'Infanterie (régiment de réserve) avaient parfait leur instruction militaire dans la région d'Aulnay-sous-Bois. Leur division avait reçu pour mission la défense du camp de retranché de Paris. Mais la bataille de Guise et la bataille de Charleroi ayant amené les armées françaises à se replier, elle fut déployée au profit des 3ème et 4ème corps qui retraitaient de Belgique.
Dès le 25 août, le 318 est transporté par trains à Arras et entame un mouvement vers le sud-est qui l'amène dans la région de Combles: c'est le baptême du feu à Guinchy et Sailly-Saillisel. Pendant deux jours, le régiment s'accroche au terrain, renouvelant ses assauts à la baïonnette sur un ennemi qu'il parvient à stopper. Mais l'ordre de repli arrive et le régiment rejoint Amiens le 30 août.
Dans ces combats, deux Braspartiates étaient tombés au champ d'honneur le 27 août:
-
Jean Patrom, cultivateur à Pennarouz, né le 28 septembre 1886 à Saint Rivoal, fils de Jean François et de Marie Lagadec;
-
Henri Jean Gaouyat, cultivateur, né le 3 septembre 1886 au moulin de Kermorvan, fils de Henri et de Annette Quiniou, meuniers.
Le
71ème Régiment d'Infanterie, renforcé de 2000 hommes reçus le 22 août, a relancé son attaque initiale sur Arsimont, mais a du se replier sur Philippeville(23 août) et doit procéder à l'évacuation d'hommes épuisés (une soixantaine en 4 jours)
“Sur les belles et larges routes de Belgique”, écrit un soldat, “se retirent la cavalerie, l'artillerie, les trains des équipages, et dans les fossés des routes, marchaient les tirailleurs, les zouaves, les fantassins mélangés. Des Belges sont mélangés à nous. Que le spectacle est triste! ... Marcher sans arrêt... marcher sans cesse... quelle soif! Quelle fatigue!...”
Le 71 arrive au village de Le Sourd, près de Guise le 29 août. Le village est tenu par l'ennemi et les combats sont d'une extrème violence: le 2ème bataillon parvient à le prendre à 10 heures mais se trouve encerclé et doit l'évacuer; les autres bataillons sont engagés sur le village de Lemé mais ne peuvent éviter la progression allemande.
“On se canardait à cinquante mètres. Arrivés à dix mètres, on chargeait aux baïonnettes. Les allemands s'enfuyaient à droite et à gauche, faisant place à l'artillerie qui nous canardait. Les allemands ont eu de grandes pertes...”
A midi, une contre-attaque dirigée par le général Bailly avec toutes les unités engagées permet de rejeter l'ennemi dans Le Sourd; les ambulances, pilonnées par l'artillerie, ont du se replier vers des localités moins exposées; le bilan est terrible: 629 disparus parmi lesquels
Joseph Pouliquen, né à Lannédern le 3 juin 1890, fils de Hervé et de Marie Jeanne Bleuzen, meunier au Grand Pont jusqu'à la déclaration de guerre...
Le Régiment a repris son repli vers la Marne...et se trouve le lendemain au combat de Tourteron...
Le Régiment a repris son repli vers la Marne...et se trouve le lendemain au combat de Tourteron...
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La 22ème Division d'Infanterie “bretonne”, après le combat de Maissin, s'était repliée vers Sedan où le 19 avait chassé les uhlans qui avaient investi la ville, et s'était réorganisée; “l'espoir renaissait dans nos coeurs, nous pensions qu'enfin nous allions arrêter l'envahisseur, puis, avec une offensive vigoureuse, prendre une éclatante revanche de 1870”.
Le 118ème d'Infanterie s'est replié sur Bouillon; la division organise la défense avec les éléments épars qui ont été recueillis (du 116, du 118, du 62...) avant de se replier sur Paliseul ouis Bouillon. Le 118 a perdu 5 compagnies sur 8, les trois autres étant réduites à des effectifs de 125 à 200 hommes... Dans la soirée du 23 août, des éléments épars des compagnies manquantes, ont réussi à rejoindre le régiment.. Au soir du 24, celui-ci peut remettre sur pied deux bataillons à 4 et 3 compagnies...
Le 26 août, les Allemands passent la Meuse et reprennent leur progression...Le 118 est alors engagé à hauteur de Saint Aignant avec le 248ème Régiment d'Infanterie (de Guingamp), donné en renforcement de la division, lequel avait perdu de nombeux soldats lors des combats de Mongimont le 22 août; de nouveau, les combats sont extrèmement violents contre un ennemi bien supérieur en nombre. Pendant deux jours, la lutte sera héroïque et les régiments s'illustrent dans les combats pour le village de Chaumont Saint Quentin. Un bataillon se déploie “dans des conditions très désavantageuses... en raison des cultures sur pied qui obligent à tirer debout ou à genoux. Accueilli par un feu violent, subissant de grandes pertes, il est obligé de se replier.”
Au soir du 27 août, le village est pris par une attaque générale de la division...
“L'enthousiasme est grand, le terrain est parsemé de cadavres habillés de gris.
Dans les granges, des morts, des blessés qui demandent qu'on leur vienne en aide; des chevaux, des moutons, des boeufs, gisent dans leurs étables; le sang coule dans les ruisseaux!”
La journée du lendemain verra le 118 pilonné par l'artillerie , contraint de se replier mais résistant à la poussée allemande avant de retraiter avec la division vers Malmy, Marquigny...
Le 248 forme quant à lui l'arrière garde de la division.
Le 30 août, la division reçoit l'ordre de s'emparer du village de Tourteron; le 118ème, le 116ème et le 248ème d'Infanterie, partent à l'assaut, sans préparation d'artillerie, celle-ci n'étant plus en mesure de combattre, vu ses pertes... L'assaut échoue et la division bat de nouveau en retraite sous le feu des canons ennemis. Le colonel Poirrier, commandant le 248, est blessé, et les pertes subies sont lourdes. Parmi les soldats tués à l'ennemi dans cette journée,
-
le caporal Jean Kerdraon, (248ème RI), né à Brasparts le 28 janvier 1885, époux de Marie Françoise Bernard ,
- le soldat Yves Le Bihan, (71ème RI), né le 26 mai 1887 à Pleyben, époux de Marie Catherine Favennec, domicilié à Brasparts ...
Dans le même temps, un peu plus à l'ouest, le
48ème Régiment d'Infanterie à été engagé, après la bataille d'Arsimont, et son repli vers la Meuse, dans la contre-atttaque divisionnaire qui englobe la région de Tourteron, cette fois à hauteur de Lemé. “Combat vif et rapide, d'un engagement soudain au corps à corps presque immédiat.” 17 officiers et 500 hommes, tués ou blessés tombent... “Mais cette fois, ce sont nos mitrailleuses qui brisent les vagues d'assaut de l'infanterie allemande”. Un autre braspartiate est tombé au cours de la journée:
Pierre Marie Labous, né le 9 décembre 1890 à Brasparts, fils de Louis et de Françoise Labous.Le 30, le régiment tient toujours sur ses positions, mais l'ordre de repli arrive...
Et la retraite reprend, vers la Marne...
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3ème acte: la première bataille de la Marne (5 au 13 septembre 1914)
Le généralissime a pris conscience du danger qui menace après ses défaites successives (bataille des frontières, bataille de Charleroi, bataille de Guise). Il a compris qu'il lui fallait préparer une contre-attaque mais que pour cela il lui fallait gagner du temps et préparer une ligne d'arrêt qui stoppe la progression allemande...
L'héroïsme de nos soldats va lui permettre cette réaction; les combats retardateurs menés par nos troupes vont lui offrir les délais nécessaires à la préparation du terrain. Depuis la Belgique, nos troupes replient en ordre, malgré les combats, malgré les pertes...
La ligne de défense de la Marne est retenue; elle sera soutenue par le camp fortifié de Paris dont les 6000 hommes envoyés en renfort par Galliéni (les fameux taxis de la Marne) vont décider de la victoire...
Les régiments que nous avons suivi jusque là sont de magnifiques exemples de cette retraite qui participa à sauver notre pays.
Le 106ème d'Infanterie, au sein duquel se trouvaient également quelques braspartiates, va nous permettre de faire le lien entre ces deux phases...
Pierre Belirit, né le 2 janvier 1893 à Brasparts, avait été affecté pour son service national au
106ème Régiment d'Infanterie de Châlons.
Son régiment avait quitté sa garnison en voie ferrée pour Saint Mihiel puis avait successivement rejoint, à pied, Saint Benoit en Woeuvre (2 août 1914), où il s'installe défensivement. Le 17 août, la 12ème division prend la direction d'Etain: le régiment prend la tête de la colonne et reçoit pour mission de tenir les rives de l'Othain qui doit être franchie par la division. L'objectif est atteint sans incident le 18 août. Le 21, nouvelle marche en avant: le régiment reçoit alors son premier ordre d'attaque pour s'emparer du pont Halanzy. Ce sera son baptême du feu: le 22 août à 10h20, alors qu'il approche du village de Cons la Granville, il est pris sous le feu ennemi, “un tir d'artillerie très bien réglé”, suivi de tirs d'infanterie et de mitrailleuses qui vont l'empêcher de progresser jusqu'à la nuit. Au cours de la nuit, il parvient à se regrouper à Longuyon.
Aussitôt des travaux de protection sont réalisés: ils vont permettre de contenir l'offensive allemande des 23 et 24 août. Le 106, soutenus par le 8ème Chasseurs et le 132ème d'Infanterie, se bat avec acharnement. Mais l'ordre tombe: il faut se replier...Lorsque, à 16heures, le colonel quitte sa position avec la dernière section encore engagée, il est blessé grièvement et reste sur le terrain...
Cette première action a coûté au régiment 20 tués, 150 blessés et 60 disparus.
“Alors commença pour nous une bien dure période qui ne s'arrêta que le 12 septembre. Marches pénibles coupées par des nuits sans repos et par de sanglants combats pour ralentir la marche de l'ennemi.”
Le 26 août, le 106 se replie derrière la Meuse (région de Cuisy, Septsarges) et se reconstitue grâce aux hommes reçus du dépôt...Il s'y installe défensivement, aménageant des tranchées, recueillant le 132ème d'Infanterie (1er septembre); le 4 septembre, nouveau repli vers
Beauzée qu'il entreprend de fortifier. La situation ne change pas jusqu'à midi...moment choisi pour une contre-attaque générale: “cette attaque doit entraîner successivement les éléments de la 12ème division... contrairement aux ordres donnés, 2 compagnies du 2ème bataillon (celui du soldat Pierre Bélirit), entendant une vive fusillade sur leur flanc, et sans attendre le mouvement de la division, se mettent en marche; leur attaque n'est pas inquiétée et le reste du bataillon suit...
13h45...Le colonel, craignant de laisser ses unités isolées dans leur action, se décide à mettre le régiment tout entier en mouvement, la fusillade augmente d'ailleurs sensiblement...Le régiment atteint, sans pertes sérieuses, l'objectif assigné...Mais au moment (15h30) où le 3ème bataillon s'engage dans le village de Pretz, l'ennemi ouvre un feu violent d'artillerie et de mitrailleuses sur tout le régiment qui ne peut y répondre efficacement, ne voyant aucun objectif et ne pouvant tirer que sur des directions probables.
Le colonel, estimant sa situation très périlleuse, aucun mouvement de la division n'étant apparent, décide de se replier...Le mouvement se fait sans désordre, par échelons successifs, jusqu'à Sommaisne. En ce point, l'ennemi couvre toute la zone dans laquelle se trouve le régiment d'une telle quantité de projectiles que certaines unités se disloquent momentanément...”
Pierre Bélirit est tombé au cours de cette journée...
A la tombée de la nuit, le régiment parvient à se regrouper et à se reconstituer... Et il reprend son repli jusqu'au 9 septembre où il subira un terrible assaut des troupes allemandes et manquera d'être submergé.
Le 106 s'est installé aux avant-postes au petit matin (entre Rembercourt et la ferme de Vaux-Marie).
“Ce fut tout le jour un bombardement effroyable, bouleversant les tranchées rapidement creusées. A la nuit, un orage éclata, puis l'obscurité est des plus sombres. Nos sentinelles harassées luttent contre le sommeil. Il leur semble soudain que les gerbes de blé en avant se déplacent peu à peu. Elles écoutent et observent avec beaucoup de sang-froid. Nul doute, les gerbes se rapprochent: c'est une nouvelle ruse des boches. L'alerte est donnée et la fusillade s'allume bientôt sur toute la ligne.
Et alors, c'est une ruée subite, formidable. Nos premiers éléments subergés se défendent héroïquement mais sont pris ou tués. L'ennemi parvient jusqu'à nos unités de 2ème ligne. Une mêlée furieuse s'engage, des corps à corps sauvages se livrent dans l'obscurité, tandis que la pluis tombe sans arrêt. Les unités du 106, par de valeureux efforts parviennent à se dégager pendant que nos 75 entrent en action, harcelant les vagues d'assaut ennemies...”
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La bataille de la Marne est donc engagée. Elle s'étend sur un front de presque 300km, de Senlis à Verdun, avec une violence inégalée jusque là. Chaque ennemi cherche à provoquer la rupture de l'adversaire: la moindre défaillance peut être désastreuse. Jamais autant d'hommes ne s'étaient battus avec tant d'acharnement et avec tant de matériels sur un aussi large front...
Losque l'allemand refluera, les armées alliées sont exsangues et ne pourront exploiter la victoire. Le général allemand Von Kluck portera un jugement très réaliste sur le soldat français: «que des hommes ayant reculé pendant quinze jours, que des hommes couchés par terre et à demi-morts de fatigue puissent reprendre le fusil et attaquer au son du clairon, c'est une chose avec laquelle nous autres Allemands n'avions jamais appris à compter : c'est là une possibilité dont il n'a jamais été question dans nos écoles de guerre. »
La division “bretonne” que nous avons laissé quelque temps a rejoint à son tour la Marne est s'est installée défensivement dans la région de
Lenharée. Elle a reçu le fameux ordre de Joffre du 6 septembre:
“Toute troupe qui ne peut plus avancer devra, coûte que coûte, garder le terrain conquis et se faire tuer sur place plutôt que reculer...”
Le 62, le 19 et le 337 occupent le village de Lenharée; le 116 occupe Normée; le 118 est entre ces deux villages. Vers 14 heures, les allemands commencent le bombardement d'artillerie et lancent plusieurs attaques qui leur permettent de s'emparer de Normée. Mais les autres régiments tiennent! Le lendemain, nouvelle attaque, dès l'aube: l'assaillant est de nouveau rejeté; une contre-attaque est préparée pour reprendre Normée mais n'aboutit pas. La canonnade se poursuivra toute la journée et toute la nuit. A 3heures 30, nouvelle attaque allemande sur toute la ligne de front... nos soldats tiennent bon. “Lenharée et les bois sont en feu, la canonnade et la fusillade sont des plus intenses; la division cède peu à peu du terrain et commence à glisser vers Connantré.
“Vers 14 heures se produit une accalmie. Les Allemands paraissent fatigués ou hésitants, leur progression a été très coûteuse, leurs attaques d'infanterie cessent.. Dans ces combats, les Boches ont beaucoup souffert, par notre feu bien ajusté derrière nos tranchées, utilisées jusqu'au dernier moment et presque à bout portant...”
Dans ces combats pour Lenharée, meurent
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Jean Louis Ménez, né au Goël le 2 janvier 1888, époux de Marie Le Corre, soldat au 118ème Régiment d'Infanterie,
- Mathieu Herry, né à Kerohan le 9 février 1885, soldat au 118ème Régiment d'Infanterie,
- Jean Louis Perrot, né à Lopérec le 14 janvier 1887, domicilié à Brasparts, soldat au 318ème Régiment d'Infanterie,
- Germain Page, né à Keramprovost le 18 mai 1891, domicilié à Pleyben, soldat au 19ème Régiment d'InfanterieLa division se rabat sur Euvy (8 septembre)
Plus près de Reims, le 71ème Régiment d'Infanterie combat dans des conditions similaires; l'efficacité des mitrailleuses françaises se montre à son tour terriblement efficace et brise les attaques allemandes du 6 septembre. Le 71 engage la poursuite et progresse malgré les bombardements de l'artillerie. Les pertes sont importantes une fois encore; un braspartiate meurt des suites de ses blessures à l'ambulance de
Fromentières le 9 septembre: Jean Célestin Hascoët, né à Dinéault le 15 février 1892 et installé à Brasparts...
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Lorsque s'engage la bataille de la Marne, le
48ème Régiment d'Infanterie (de Guingamp), affaibli par les pertes précédentes, est en deuxième ligne et ne prend part au premier rang qu'à des “actions de détail”.
Le 9 septembre, une arrière-garde ennemie tentant de freiner la poursuite, près de la ferme de la Roquetterie, sur la route de Montmirail à Champaubert, à 2 kilomètres environ de Fromentières, le 3e bataillon se déploie, fixe l'ennemi et permet à d'autres éléments de le manoeuvrer. Dans cette action, nous dit l'historique du régiment, “les mitrailleuses et le canon nous ont causé ce jour-là des pertes sensibles”: parmi les blessés,
François Marie Le Meur, né au Moustoir le 10 avril 1892, qui décède quelques jours plus tard, à Bouchy-le-Repos...tandis que le régiment reprend l'offensive en direction de Reims où il assistera, impuissant à l'incendie de la cathédrale par les tirs d'obus incendiaires par les allemands...
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Le
4ème Zouaves était engagé dans la guerre depuis et avait regroupé ses bataillons dans la région parisienne: 2 venaient du Maroc, 2 de Bizerte et le cinquième était stationné à Rosny-sous-Bois. Il reçoit son baptême du feu dans la bataille de Charleroi le 23 août, près de Terciennes.
“Pour échapper aux balles, par instant, les Zouaves arrachent aux meules des gerbes de blé et s'en servent de boucliers. Ces gerbes mouvantes tombent, rougissent de sang, mais beaucoup se relèvent, bondissent, se couchent pour rebondir encore et peu à peu les sections se reforment.”
La bravoure du 4ème Zouaves, à l'image des autres unités des armées alliées, ne suffit pas, et la retraite qui suit mène le régiment à l'Oise (27-29 août) où il se bat courageusement sous le feu de l'artillerie et des mitrailleuses supérieures en nombre, puis l'Aisne (2 septembre) et la Marne (3 septembre). Les hommes sont épuisés, et reculent sous le feu et la pression ennemie, quand intervient l'ordre de Joffre.
“Jusqu'au 13, le 4e Zouaves ne connaîtra de la grande victoire que les marches forcées, combien rudes après les étapes de la retraite qu'il vient de couvrir ! mais de quel cceur tous partent de l'avant au matin du 7 !”
“Le 9, on se rapproche de l'ennemi en fuite, talonné par les éléments du 18e Corps.
Et l'on marche, on parcourt des kilomètres dans l'enthousiasme.
Tout atteste le désarroi, la surprise, la déroute de l'adversaire si sûr de lui quelques jours auparavant. Les champs s'émaillent du butin dispersé, les colonnes de prisonniers refluent vers nos arrières. Il n'est plus question de fatigue. On marche, on se réapprovisionne avec les dépouilles de l'ennemi.”
Le 4ème Zouaves fournit une compagnie en renforcement du 2 dans la région de Compiègne: cette compagnie participe à l'attaque de Mont-Choisy et de Laigle. Trois cents hommes, zouaves, tirailleurs, fantassins, se groupent autour du commandant Fabre et ne peuvent s'emparer que de quelques maisons. Ils ont eu affaire à toute une division allemande.
Le lendemain, 17 septembre 1914, on se bat à Cuts, Carlepont, Laigle... C'est là que tombe
Jean Crenn, né le 7 avril 1893 au bourg de Brasparts, fils de Marc et de Catherine Buzit.
Mais la route de Paris a été barrée. Toutes les contre-attaques allemandes vont échouer.
La guerre rentre dans une nouvelle phase.
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4ème phase: L'arrêt (18 septembre-28 octobre)
Sur tout le front, à partir de la Marne, l'armée française avait engagé la poursuite. Mais l'épuisement et les pertes subies ne permirent pas l'exploitation de la victoire de la Marne. Les allemands s'arrêtent sur l'Aisne et s'y installent défensivement. Les unités s'enterrent alors et défendent opiniâtrement les secteurs conquis. Elles commencent à organiser le terrain pour y durer...
Nous avions laissé le 67ème Régiment d'Infanterie sur la Meuse; lui aussi s'est replié sur la Marne et a participé à la victoire qui a sauvé la France. Pour soulager le 54ème, le 67 lui donne une compagnie en renforcement. Le 54 a perdu son chef, une grande partie de ses officiers, plusieurs centaines d'hommes, bilan terrible qui le laisse épuisé dans un secteur particulièrement difficile: le bois des Eparges et la tranchée de Calonne.
“Sans mitrailleuses, sans abris, sans repos”, ... “le 54 (y) combattit d'octobre 1914 à août 1915”.
Pierre Marie Bras, né le 1er avril 1892 à Kerfanq, faisait partie de cette compagnie donnée en renforcement. Il fut tué à l'ennemi le 22 septembre 1914 près de Mouilly Saint Rémy.
Les allemands se sont ressaisis et cherchent à déborder nos lignes par l'ouest, ce que l'on a appelé “la course à la mer”. En fait,les français répondent en poussant des régiments dans les secteurs envahis. Les deux manoeuvres opposées vont progressivement s'annihiler...
La division “bretonne” est transportée par train dans la Somme et va livrer de nouveau bataille.
Là encore, les combats sont d'une extrême violence et l'histoire conserve les nom de ces villages martyrs: Ribécourt, Lassigny, Carrepuis, Chilly, ... Les allemands , bien couverts par les bois, restait à peu près invisibles, et étaient soutenus par une puissante artillerie lourde, ne purent être délogés de leurs positions malgré les attaques successives des fantassins, des zouaves, des marsouins, des tirailleurs. Trois régiments participèrent aux assauts infructueux contre Moulin-sous-Touvent, dont le 318ème d'Infanterie, les 21, 23 et 26 septembre. Dans l'attaque du 23 périrent
Pierre Jean Favennec, cultivateur de Sternéfars, né le 6 janvier 1887 à Brasparts, époux de Marie Jeanne Kermarrec, et
Jean Louis Labous, né le 4 juillet 1885 à Lopérec, époux d'une braspartiate, Marie Françoise Fitamant.
Notons que ce lieu de Moulin-sous-Touvent restera marqué par l'ensevelissement complet d'une compagnie de zouaves en décembre 1914, suite à l'explosion d'une mine allemande...
Hamel est un charmant petit village du Nord situé dans la vallée de la Sensée, bordé par des marais et surmonté de côteaux. Une crête surplombe le village à son est et fournit un excellent poste d'observation. Le 19ème Régiment d'Infanterie, fin septembre 1914, occupe la ligne de chemin de fer d'Arras. Le secteur n'est pas encore organisé défensivement -quelques tranchées...- lorsqu'une contre-attaque allemande se produit le 26 septembre. Le 19 reçoit l'ordre de se porter vers l'avant: pendant 4 jours, il va se battre contre un ennemi supérieur en nombre et en puissance de feu, qui occupe déjà le bois d'Authuille et le Château (cf. Carte)... Les soldats français tombent dans un véritable piège, pris sous le feu des mitrailleuses et les obus. Ils devront se replier, mais les combats dans le secteur vont se poursuivre... Le 19 laissera nombre de ses soldats dans ces combats, parmi lesquels
Jean Nicolas Labous, originaire de Quimerc'h mais installé avec ses parents à Runénez, tué à l'ennemi le 5 octobre.
Mais les autres régiments bretons ne seront bien évidemment pas épargnés non plus dans ces combats. Ainsi le 118ème Régiment d'Infanterie, qui s'est également porté sur Hamel à partir du 4 octobre, s'installe défensivement sous les bombardements allemands. “Le 5 au matin, l'ennemi déclenche une attaque violente... Le combat est âpre, notre résistance est très vive, l'ennemi tire en marchant, l'arme sous le bras; il progresse,, mais ses pertes sont sévères. Néanmoins, il réusssit à prendre pied dans Beaumont et nous oblige à nous replier...”
Les adversaires creusent des tranchées et forifient leurs positions; réseaux de barbelés, appui du génie... et tenir ainsi jusqu'au 17 décembre. Entre temps, d'autres braspartiates ont trouvé la mort:
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Yves Marie Auffret, né à Kerambellec le 6 juin 1892, succombe le 8 octobre 1914 à Amiens, suite à ses blessures;
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Pierre Marie Nezet, né le 22 décembre 1887 à Bourg ar Hoël, décède le 12 octobre à l'hôpital militaire de Saint Just en Chaussée;
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Jean Goulhen, né le 25 décembre 1892 à Keryvarc'h, meurt le 14 octobre à Amiens, succombant à l'épidémie de typhus qui frappe nos armées;
Pierre Bernard, né le 10 janvier 1885 à Langle, soldat au 318, et
Louis Le Corre, du 118, originaire de Plonévez-du-Faou et domicilié à Brasparts, seront emportéé par cette épidémie le premier le 28 novembre à Compiègne, le second le 15 décembre à Amiens;
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Yves Toullec, né à Ty Névez le 6 avril 1882 et cultivateur au bourg de Brasparts, qui avait rejoint le 118 à la mi-août 14, décède le 20 novembre.
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François Plassart, de lopérec, installé à Langle, soldat au 318ème d'Infanterie, évacué lors de la bataille de la Marne, succombe à ses blessures à l'hôpital de Tours le 17 octobre.
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Jean Louis Yvenat, de Plonévez, installé à Sternéfars après son mariage avec Marie Catherine Ménez, soldat au 118, qui avait été évacué pendant la bataille de la Marne et se trouvait à l'hôpital militaire de Rennes, y est mort le 19 novembre...
Le 17 décembre, en exécution du nouvel ordre d'offensive du général Joffre, le régiment attaque à la Boisselle, tandis que le 19 attaque Ovillers. “Le génie doit placer des charges allongées pour détruire les barbelés ennemis et mettre le feu simultanément à toutes les charges, à 6 heures du matin. L'attaque se fera à la même heure, sans préparation d'artillerie.”
Le 19 échoue, le 118 s'empare du cimetière de Beaumont.
Joseph Kermarrec, menuisier, né à Pennaménez le 13 juin 1890, est tué à l'ennemi.
L'attaque doit être renouvelée le 18 mais est reportée, enraison du feu ennemi.
Elle reprend le 24. Les pertes sont énormes des deux côtés.
Jean Marie Joseph Créoff, né le 18 mars 1888 à La Garenne, et
Emile Glévarec, originaire de Pleyben, dont les parents demeurent à Brasparts, tombent près du cimetière de La Boisselle...
Les adversaires s'accrochent au terrain et l'organisent de mieux en mieux. La vraie guerre de tranchées et de mines commence...
Le 118 va occuper ce secteur de La Boisselle jusqu'au 28 juillet 1915...
Un autre ancien braspartiate,
Pierre Tanter, qui fut instituteur avant-guerre à Brasparts, époux de Marie Jeanne Quiniou, avant d'être nommé dans la Sarthe, est décédé le 8 novembre des suites de ses blessures à l'hopital de Louhans où il avait évacué...
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L'année 1914 s'achève sur un bilan terrible (250 000 jeunes français tués en 5 mois de guerre). Mais l'invasion est arrêtée et la ligne de front stabilisée. Une autre guerre commence, qui sera longue et dramatique.
Sources:
Journaux de marche et Historiques des Unités
Registres matriculaires des archives départementales
Registres d'état-civil de la commune de Brasparts
Fiches MPF du SGA
Forum de la guerre 14-18
Souvenirs et témoignages divers
Collection de L'Illustration
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et bien évidemment la somme réalisée par Roger Laouénan sur les Bretons dans la Grande Guerre